Mon esprit assoiffé de couleurs, s'empressait de rendre aux arbres leurs feuilles perdues sous la canicule, et de faire refleurir les champs arides devenus soudain verdoyants, par indulgence ou par pitié pour une âme endolorie, qui s'était livrée à ses chimères, afin de fuir le stress d'une journée inoubliable.
 
Toutes les splendeurs de ce tableau se déroulaient devant mes yeux, comme par enchantement, tel un parchemin féérique, né instantanément dans mes rêves flous, balayés en permanence par les vibrations sourdes de l'extracteur d'oxygène.
 
La nature doit être embellie, et j'aimais à la repeindre à mon goût, hors saison, hors maladie, hors souffrance,... mon rêve ayant toujours été de vivre le printemps en hiver, afin que tous les jardins soient gorgés d'eau, et que les gouttes de pluie se transforment en rosée transparente, ces larmes que les roses auraient omis de verser au moment opportun, et précieusement réservées pour un jour comme celui-ci... un moment important, non prévu sur mon triste calendrier, un jour où l'on me dirait, que les hôpitaux d'Alger n'avaient plus de place pour accueillir ou soigner tous les malades: « Cherchez un lit ailleurs... »
 
Le flux d'oxygène ne me gênait plus par son souffle constant, le chant du vent dans les arbres touffus l'avait remplacé, et couvert son crépitement agaçant.
 
Je fermai les yeux sur mes rêves, et essayai de me concentrer sur leur beauté, de m'en imprégner, avec intensité. Je fis appel à Dieu, Allah qui ne me quittait jamais, je priais longtemps pour la disparition de tous les maux, et le rétablissement de tous les patients, victimes de la pandémie.
 
Le voyage fut très long et très éprouvant, mais nous finîmes par en venir à bout, quelques heures plus tard. Elhamdoulillah.